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22 mars 2022

Critique (par des critiques éblouis) du spectacle d’Art Maniac

Paris 11e, ruelle pavée et immeubles colorés. Au fond de l’impasse, un petit théâtre à la devanture rouge et au store perlé de quelques guirlandes lumineuses d’un jaune chaleureux: vous entrez dans le passage vers les étoiles pour descendre vers une salle intime à la scène obscure.

 

Les lumières s’allument. A jardin comme à cour, pendant que vous observez, subjugués, la scène d’ouverture se dérouler,  les acteurs s’agitent. S’ils ne se sont que récemment révélés, ces hommes peu en vue n’en sont pas moins des artistes.

Cachés toute l’année pour vous accueillir dans cette maison de fous, après l’ultime mise au point des lumières, les tirades sont déclamées avec aisance et naturel. Retranscrire l’émerveillement ressenti est un art qu’on maîtrise aussi mal que les acteurs d’Art Maniac maîtrisent bien celui d’époustoufler.

Feydeau (1862-1921) a su écrire et la troupe a su jouer.  Un fil à la patte (1894) est une comédie en trois actes. Bois d’Enghien l’amant et fiancé deux-en-un, Lucette la maîtresse digne des plus grandes scènes et Marceline sa soeur désabusée, Viviane la fiancée énamourée aux goûts douteux ; ajoutez-y une pointe de musique, une touche d’anglais, un notaire musicien du nom de Bouzin, le général Irrigua assisté d’Antonio, les beaux-parents barons Duverger consternés, Nini, de Chenneviette et de Fontanet les amis excentriques à l’haleine plus ou moins douteuse, Firmin et Emile les valets au caractère bien trempé, Miss Betting la dame de compagnie et Jean le concierge; emballez de quid pro quo, d’humour assassin et du charme du vaudeville, le tout joué par une troupe de haut vol où on retrouve même un policier et une fleuriste : même si vous étiez assis dans un courant d’air, vous resteriez.

La pièce est jouée par la troupe d’Art Maniac, association aussi secrète que talentueuse, menée par les excellents metteurs en scène Théo Riera et Ronan Heuzel. On aimerait vous en dire plus, il ne vous reste plus qu’à attendre la levée du rideau pour comprendre. Comprendre, ou peut-être ressentir. L’émotion des derniers filages ne sera rien à côté de celle des représentations. Le jeu est vif et plein d’ironie, la mise en scène puissante et captivante, la troupe charmante et brillante.

Pour vous qui ne verrez que le produit fini, sachez que ce que nous avons vu, c’est une agitation palpable où tous semblent savoir ce qu’ils doivent faire, de l’adrénaline plus que du stress, et le temps suspendu pendant que, dans un cérémonial qui impose le silence de la salle, la troupe se concentre en cercle. La confiance entre eux et leur excitation sont tangibles..

La troupe unie, joyeuse et entraînante nous transporte dans le Paris des années 1930 dans un fidèle hommage qui reprend Feydeau sans lui faire l’affront de le faire mal vieillir. Venez être émerveillés.

Il est temps de baisser les masques et de lever le rideau. Art Maniac vous attend au passage vers les étoiles.

Cet article vous est proposé par Apolline Augey et Blanche Pitzus, membres de Streams.

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